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Visas : le Mali réplique à la mesure américaine en imposant à son tour une caution aux ressortissants des États-Unis

La rédaction de Globe infos. Le 13 octobre 2025.

Le Mali a décidé de réagir à la mesure américaine imposant une caution aux demandeurs de visa originaires de plusieurs pays africains, dont le sien. Dans un communiqué diffusé dimanche 12 octobre, le gouvernement de transition à Bamako a annoncé que les ressortissants américains devront désormais verser, à leur tour, une caution comprise entre 2,8 millions et 5,6 millions de francs CFA (environ 4 500 à 9 000 dollars) pour entrer sur le territoire malien.

Une réponse immédiate à la décision de Washington

La décision américaine, publiée la semaine dernière, impose aux ressortissants maliens souhaitant obtenir un visa pour les États-Unis de déposer une caution allant de 5 000 à 10 000 dollars, censée être restituée après leur retour dans leur pays d’origine. Washington justifie cette mesure par le taux élevé de non-retour de certains titulaires de visas temporaires.

Mais à Bamako, la décision a été perçue comme une atteinte à la dignité nationale et une mesure “discriminatoire”. Dans un communiqué officiel, les autorités maliennes ont dénoncé “une décision unilatérale et inamicale” et annoncé une riposte “fondée sur le principe de réciprocité”.

Le principe de réciprocité comme instrument diplomatique

Cette réaction s’inscrit dans une logique de politique étrangère que le Mali assume de plus en plus ouvertement : celle d’une diplomatie souverainiste. Depuis la prise de pouvoir du colonel Assimi Goïta en 2021, le pays multiplie les gestes d’affirmation vis-à-vis des puissances occidentales, qu’il accuse d’ingérence dans ses affaires internes.

“Le Mali veut montrer qu’il dispose de la même capacité d’action et qu’il n’accepte plus de mesures unilatérales imposées de l’extérieur”, analyse un chercheur en relations internationales basé à Bamako. “Il ne s’agit pas tant d’une question de visa que d’un message politique.”

Des relations déjà fragilisées avec les États-Unis

Les rapports entre Bamako et Washington se sont progressivement détériorés au cours des dernières années. Les autorités américaines ont plusieurs fois critiqué la gestion de la transition politique malienne et la présence croissante de la Russie, via le groupe paramilitaire Wagner, dans les opérations de sécurité au Sahel.

La suspension de certaines aides américaines au développement, ainsi que le retrait partiel de la coopération militaire, avaient déjà entamé la confiance entre les deux capitales. Cette nouvelle querelle consulaire pourrait accentuer un climat de méfiance réciproque.

Un impact diplomatique limité mais symbolique

Si le nombre de voyageurs américains au Mali reste faible, la portée symbolique de cette décision est forte. Pour Bamako, il s’agit d’un acte d’affirmation politique, adressé à la fois à Washington et à ses propres citoyens, dans un contexte où la souveraineté est devenue un pilier du discours officiel.

À Washington, aucune réaction officielle n’avait encore été publiée lundi. Un diplomate américain, joint par Le Monde Afrique, a toutefois indiqué que “la mesure américaine n’était pas dirigée contre le Mali spécifiquement” mais relevait “d’une politique migratoire globale”.

Une diplomatie de rééquilibrage

Cette séquence illustre la volonté du Mali de redéfinir ses alliances et de se positionner comme un acteur indépendant sur la scène internationale. Depuis sa rupture avec la France et son rapprochement avec Moscou et Pékin, Bamako adopte une diplomatie plus affirmée, parfois au risque de l’isolement.

Pour certains observateurs, la réaction malienne traduit aussi un réflexe de légitimation interne : “Face à une opinion publique sensible à la question du respect et de la souveraineté, cette riposte renforce la posture d’un État qui ne cède plus à la pression étrangère”, estime un analyste du think tank Wathi, à Dakar.