Libreville, 08 Octobre 2025. Que les choses soient dites de manière claire et sans la moindre ambiguïté : le Président de la République ne violera pas la loi en annulant les élections législatives et locales de septembre dernier. Aucune disposition légale ne lui confère ce pouvoir. Seule la Cour constitutionnelle peut le faire. Elle est l’unique juge des élections au Gabon. Et ce n’est que sur la base de requêtes bien constituées qu’elle peut juger recevable les recours posés.

À entendre les jérémiades injustifiées qui alimentent les conversations dans les QG politiques, les salons feutrés et sur les réseaux sociaux, on a l’impression que la raison et le bon sens ont foutu le camp chez certains compatriotes, bien heureusement minoritaires.
Qui en dehors d’Alain Claude Bilie by Nze avait émis des réserves quant à la problématique des conditions d’existence d’un parti politique et celle du déroulement du scrutin et de l’organisation des élections par le ministère de l’intérieur ? Du haut de son expérience, nourrie par l’histoire des faits, il a su et vu, pourquoi et comment, sont nés les différents organismes chargés de gérer les élections dans notre pays, de la CNE au CGE en passant par la CENAP ?
C’est donc une aberration voire une folie sans nom que de conditionner l’existence d’un parti politique au nombre de ses élus. Un parti politique existe d’abord pour faire vivre un idéal par les idées. Les élus à séduire ici c’est le peuple souverain et non ses représentants. On ne sait comment il est venu à l’esprit des organisateurs du dialogue d’Agondje cette solution totalement antidémocratique. En voulant arrêter la prolifération des partis politiques transformés en fond de commerce par cette absurdité légalisée, on a tué la liberté d’expression qui est un pilier de la démocratie.
Ce n’est pas parce que certains utilisent les machettes pour opérer des crimes rituels qu’on va interdire sa production ou son usage à ceux qui le font pour des besoins ordinaires : couper l’herbe, abattre les arbustes et autres…
De plus, la mise en place des institutions électorales, perfectibles parce que les réalités politiques et sociales changent, n’était pas du folklore. Arrachées après d’âpres combats politiques engagés par Oyono Aba’a, Agondjo Okawe, Mba Abessolo, Mamboundou Mamboundou et bien d’autres, ces institutions tentaient justement de régler ce pour quoi certains crient aujourd’hui. La politique ne se fait pas dans les émotions mais avec beaucoup de raison car il en va de l’avenir de millions de vies et du devenir de notre Nation.
Chaque pays doit évoluer en maîtrisant son histoire. C’est à ce niveau que les archives nationales, sous d’autres cieux, contribuent à orienter les décisions des gouvernants dans le seul but de ne pas reproduire les erreurs du passé. Et nous y sommes avec ces élections législatives et locales organisées par des fonctionnaires. Les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Soyons un peu sérieux dans notre pays et acceptons que ce ne sont pas tous les gabonais qui ont la tête déchirée. Était-ce le ministère de l’intérieur qui avait proposé et décidé de l’application des dispositions contenues dans le nouveau Code électoral ? La réponse est trois fois NON. Il revient donc à ceux qui ont bel et bien pris part au dialogue politique d’Agondje d’avril 2024 d’en porter la pleine et lourde responsabilité.
Il est vrai que le temps a fait couler des litres d’eau sous les ponts. Cependant, il y a encore des gabonais qui ont connu l’ère Mboumbou Miyakou où c’est bien le ministère de l’intérieur qui était chargé d’organiser les élections dans notre pays.
Pourquoi alors vouloir s’acharner sur Hermann Immongault, le ministre de l’intérieur, qui n’était pas au dialogue d’Agondje où il a été décidé de ressusciter cette recette faisandé ? Et là, sans gêne et toute honte bue, on assiste à une séance de « sorcellerie politique » où l’injustice, l’inconséquence et l’irresponsabilité tendent à atteindre leur paroxysme.
Le pire dans ce charivari, c’est qu’on veut oublier de condamner les fraudeurs qui ont jubilé hier à « la libération » et imposent aujourd’hui au peuple gabonais de porter les chaînes de la honte en trichant. On refuse de pointer du doigt ceux qui continuent de considérer les gabonais comme des bœufs votants pour se trouver le bouc émissaire parfait et facile au ministère de l’intérieur. C’est tout simplement honteux et inacceptable.
Quel est ce pays où on refuse toujours d’analyser les causes d’une situation mais on pointe systématiquement le doigt sur les conséquences ? Que cela soit entendu, chacun devra assumer son « OUI » au référendum du 16 novembre 2024 car nous sommes à l’heure de l’expérimentation, hélas douloureuse et regrettable.
Aussi, il est important de prendre conscience que, ce n’est pas parce qu’une personne n’est pas d’accord avec vous qu’elle est forcément contre vous. Le Président de la République devra prendre acte du vacarme qui menace la paix sociale mais surtout la fiabilité de son action du 30 août 2023 et la crédibilité de son image publique orchestré par ceux qui lui disaient hier « oui tout est bon », abat les gens comme Hervé Patrick Opiangah qui avait émis de grandes réserves légitimes quant à l’esprit de la Nouvelle loi fondamentale. Plus que jamais la collection d’opportunistes et la brochette de perfides trompeurs aux côtés du Général Président de la République ont été démasquées.
Partout dans le monde, l’Etat de droit repose sur la loi, qu’elle soit constitutionnelle ou électorale. Au Gabon il ne peut en être autrement. Au moment où nous vivons le temps des élections législatives et locales, il n’est pas question de débattre sur le bien fondé des dispositions qui ont été décidées au dialogue d’Agondje. S’il fallait assister à une levée de bouclier, c’était lors de cette grande foire du 2 avril 2024. Mais rien… Visiblement, les adeptes de Sylvia Bongo qui avait dit à Ryad qu’elle « encule la République » semblent encore trop nombreux dans notre pays et principalement dans les arcanes du pouvoir. Le nombrilisme dont ils font montre est à vomir. Après avoir demandé au Président de la Transition de dissoudre le Parti Démocratique Gabonais qui sans doute sortira la deuxième force politique du pays, après ces élections législatives et locales, voici qu’on veut le transformer en Tout de Babel, en lui demandant d’engager un projet démentiel comme celui d’annuler toute une élection. Et ça nous parle de démocratie, d’État de droit et responsabilité.
Que les acteurs politiques apprennent à crier pour la République d’abord et non pour leurs propres poires. Dieudonné Aba’a Owono, le Président de la Cour constitutionnelle, le seul juge de la transparence électorale et de la sincérité du scrutin vous attend avec vos dossiers dûment constitués. Ainsi, certains comprendront que ce n’est pas Mborantsuo Marie Madeleine, la fille de Jean Kabamgoye et de Berthe Nouo qui a inventé le concept « d’irrecevabilité » en droit à la Cour constitutionnelle.
Qu’on arrête de distraire les Gabonais et qu’on stoppe ce vacarme. Brice Clotaire Oligui Nguema n’a nullement trahi sa promesse de faire connaître à notre pays des élections libres, crédibles et transparentes. Il y a belle et bien une institution qui traite de ces questions. De la présidence de la République à la cour constitutionnelle il y a juste un pas à faire. Pas besoin d’emprunter Air France qui les sépare pour y arriver.
Par Télesphore Obame Ngomo.